Fadi El Khatib : «Je ne voulais pas de wildcard»

Publié le par Jean-Philippe Chognot

Fadi.jpgFadi El Khatib est le porte-drapeau du sport levantin. De la Sagesse à l’équipe nationale, il est le dénominateur commun du basketball libanais des deux décennies écoulées. Désormais, l’ailier de Champville nourrit deux objectifs prioritaires : se qualifier pour les Jeux olympiques de Londres et, surtout, faire émerger une nouvelle génération capable de reprendre son flambeau.

 

Que représente pour vous la troisième participation du Liban au Championnat du monde ?

De mon point de vue, ce Championnat du monde n’est pas important. J’y ai déjà joué à deux reprises dans le passé. Ce que j’ai accompli dans ma carrière va bien au-delà d’une simple participation à cette compétition. Ce qui m’importe, c’est le championnat d’Asie 2011 qualificatif pour les Jeux olympiques de Londres. En plus, ce Mondial m’est presque égal parce que je voulais y aller en me qualifiant sur le terrain. Pas en obtenant une wildcard. Je pense que notre participation est une mauvaise chose et que les gens vont dire : « Si le Liban est ici, c’est parce qu’il a payé. »

 

Depuis le début de votre carrière, vous n’avez joué que six mois à l’étranger. Pourquoi une telle fidélité ?

Je suis le genre de personne qui ne peut pas quitter son pays, sa famille, ses amis. Je fonctionne à l’affectif et je ne peux pas supporter de rester loin du Liban. Pourtant, j’ai eu de nombreuses offres d’Europe et d’ailleurs. J’en reçois toujours aujourd’hui. J’ai été choisi en 2003 par les Clippers mais j’étais sous contrat avec la Sagesse. J’ai eu des offres françaises, grecques, italiennes, russes… En 2007, Elias Zouros, qui avait entraîné au Liban auparavant, voulait me faire venir à Paris. On m’a aussi proposé un contrat très lucratif de quatre ans en Ukraine, que j’ai refusé pour rester à la maison. C’est la seule raison.

 

Vous avez tout de même tenté votre chance en Ukraine en 2007, aux Cherkassy Monkeys…

Oui et cela reste une très bonne expérience. Mon contrat s’élevait à 2,3 millions d’euros sur trois ans sans les bonus. J’ai marqué 37 points dès mon premier match. J’étais le meilleur marqueur de la ligue et le joueur qui a reçu le plus de voix pour le titre de MVP. J’ai été performant contre Khimik, Kiev et Mariupol. Mais au bout de six mois, je ne pouvais plus supporter la météo, le mode de vie… J’avais le mal du pays. Ma famille vivait à cheval entre l’Ukraine et le Liban. L’année suivante, mes enfants allaient commencer l’école au Liban et j’aurais donc été éloigné des miens. Je ne pouvais pas rester.

 

En marge de votre carrière de joueur, vous gérez plusieurs affaires. En quoi consistent-elles ?

Je dirige une entreprise de fret maritime. Nous expédions des marchandises par bateau. A côté de cela, je suis en train de monter un gros business avec un ami. Nous créons Sportsville, mon académie officielle de basketball. Elle doit ouvrir début septembre. Mon objectif est de repérer de nouveaux talents au Liban et de leur offrir l’occasion de progresser à mes côtés. Nous prévoyons d’accueillir environ 500 enfants de 4 à 19 ans que nous répartirons par tranches d’âge. Ils s’entraîneront les samedis et dimanches entre 9 et 15 heures et seront totalement pris en charge. Je vais m’y impliquer personnellement en tant que coach-formateur.

 

Que manque-t-il au basket libanais pour encore progresser ?

Le Liban est trop petit. Nos équipes ne disposent pas des revenus et des sponsors des équipes européennes. Chez nous, les clubs reposent sur le mécénat de leur président ou des hommes politiques… Ici, les entreprises préfèrent soutenir les chanteurs, plutôt que le sport. Pourtant, le basket est quelque chose d’énorme au Liban. Je pense que c’est une aubaine pour tout le monde de s’y impliquer. Lorsque les entreprises financent un chanteur, c’est du one-man- show, alors que lorsqu’elles mettent de l’argent dans le basket, cela profite à tout le pays. Cela permet au Liban de viser plus haut.

Propos recueillis par Jean-Philippe Chognot, à Beyrouth

 

Article publié dans le MaxiBasket d'août-septembre 2010, en page 88-89.

Publié dans Basketball

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